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La construction fait face à des années difficiles et présente ses leviers pour les élections de 2024

JCO

La construction connaît un recul de 0,3 % cette année, et ne connaîtra qu’une croissance très limitée de 0,2 % en 2024. La construction résidentielle a été très touchée cette année (-7,1 %), alors que la croissance de la rénovation de logements a aussi fortement chuté (de 4,6 % en 2022 à 1 % en 2023). Selon une récente étude d’Embuild, ces deux branches de la construction connaîtront encore des difficultés en 2024 et 2025. Raison pour laquelle la fédération de la construction présente aujourd'hui ses propositions ambitieuses pour les élections du 9 juin 2024 : en effet, le secteur de la construction a une fonction de levier pour relever les grands défis sociétaux auxquels nous sommes confrontés. À cette fin, le secteur de la construction et de l’installation met en avant quatre priorités générales : des logements accessibles et durables, plus d’investissements publics, des emplois attractifs dans la construction et une construction tournée vers la technologie.

 

Résultats 2023 et prévisions 2024

2023 n’est pas une bonne année pour la construction, avec une baisse globale de l’activité de 0,3 %. Le secteur qui a le plus souffert est la construction de logements. Principalement en raison de l'augmentation des prix des matériaux et du triplement des taux hypothécaires, cette importante branche de la construction a reculé de 7,1 %. En outre, Embuild s’attend encore à une nouvelle baisse de la construction résidentielle en 2024 (de 5,3 %). La rénovation de logements a également connu un coup dur cette année : la croissance passe de 4,6 % en 2022 à 1 % cette année, et se fixera à 1,6 % l’année prochaine.

 

La situation n'est pas rose non plus dans la construction non résidentielle, avec une baisse de 2,8 % cette année, bien qu'il y ait une chance de légère reprise (+1,6 %) en 2024. Soutenue, entre autres, par les plans de relance, la rénovation non résidentielle s’est plutôt bien comportée avec une croissance de 2,7 % cette année, mais connaîtra une nouvelle baisse en 2024
(-1,8 %), les plans de relance générant alors moins de travaux.

 

Notons cependant un point positif cette année : les travaux d’infrastructure enregistrent une croissance de 4,9 %. Et ce secteur se portera encore très bien en 2024 (+3,9 %). Et ce, surtout grâce aux élections locales, car dès 2025, les travaux d'infrastructure devraient baisser (-0,8 %).

 

En d'autres termes, les temps sont durs pour la construction. C’est pourquoi Embuild a élaboré cinq mémoranda, un pour chaque niveau de pouvoir (européen, fédéral,  wallon, bruxellois et flamand), afin de présenter les solutions du secteur de la construction et de l’installation pour assurer un avenir durable.

 

 

Propositions européennes

La Commission européenne a élaboré un cadre financier pour le financement durable : la « taxonomie », un langage commun sur lequel les investissements dans les projets écologiques peuvent être basés. La réglementation sur la taxonomie doit cependant mieux être adaptée aux réalités techniques et économiques du secteur, afin de pouvoir être appliquée de manière productive. De plus, des Banques-carrefour européennes de la Sécurité sociale et des Entreprises doivent être mises en place, pour permettre aux services d’inspection de disposer à tout moment des informations nécessaires pour lutter contre la fraude sociale, pour contrôler le respect des conditions du détachement et le paiement des cotisations sociales. En outre, l’Europe doit s’assurer que nous pouvons atteindre les objectifs climatiques, grâce à de nouveaux plans d’investissement.

 

Propositions fédérales

En raison de limitations budgétaires, le gouvernement fédéral a limité la baisse de la TVA sur les démolitions-reconstructions aux particuliers à partir de 2024. « La limitation du taux réduit de TVA ne se montre pas à la hauteur de l’extension et de la rénovation nécessaires de notre parc de logements vétuste. En effet, les démolitions-reconstructions individuelles sont positives, mais loin d’être suffisantes. Notre pays doit construire pas moins de 225 000 logements supplémentaires dans les sept prochaines années pour répondre à nos besoins. C'est pourquoi nous continuons à faire campagne pour que le taux réduit de TVA s'applique également aux projets de vente de démolition-reconstruction », explique Niko Demeester, CEO d’Embuild.

 

Pour le moment, nous ne consacrons que 2,7 % de notre PIB aux investissements publics, soit bien moins que les 3,4 % de nos pays voisins. D’ici 2029 et la fin de la législature suivante (2034), les investissements publics globaux devront augmenter à tous les niveaux de pouvoir afin d’assurer la pérennité de nos infrastructures. Pour le gouvernement fédéral, les investissements publics doivent passer de 3,3 milliards en 2021 à 4,9 milliards en 2029 et 6,1 milliards en 2034.

 

La lutte contre la fraude sociale est une priorité pour Embuild. Encore ce mois-ci, la fédération de la construction conclura un second plan pour une concurrence loyale avec les syndicats et le gouvernement fédéral, avec de nouvelles propositions pour lutter contre le dumping social. L’élément essentiel à cet égard n’est pas tant de renforcer la réglementation, mais d’améliorer l’application et le contrôle des règles par les inspections sociales et les auditorats du travail. « Nous appelons donc à renforcer l’appareil de contrôle et de sanctions auprès de toutes les inspections sociales et les auditorats, afin de pouvoir contrôler la législation actuelle correctement, plutôt que d’introduire de nouvelles règles », poursuit Niko Demeester.

 

Les entreprises de construction belges, par rapport aux quatre pays qui représentent plus de 90 % des détachements en Belgique, souffrent encore d’un désavantage compétitif de 2,7 euros par heure, en termes de coût salarial. Pour éliminer ce désavantage de coût salarial de 2,7 euros par heure, la dispense partielle de versement du précompte professionnel devrait être encore augmentée.

 

Dans les marchés publics, outre le prix, la qualité devrait désormais être un facteur décisif dans l'attribution. L'attribution des marchés publics à l’offre au prix le plus bas n'est vraiment plus conciliable avec les enjeux actuels du secteur de la construction : dans un contexte de durabilité, il est impératif d'accorder une plus grande importance à la qualité, en tenant compte de l'innovation, de l'économie circulaire, de la performance énergétique, du respect de l'environnement, etc.

 

Propositions wallonnes

Afin de renforcer les investissements publics en Wallonie, il est proposé de poursuivre et d’accentuer les investissements publics productifs du Plan de Relance Wallon et du Plan « Mobilité et Infrastructures pour tous », de s’appuyer sur une comptabilité patrimoniale publique fiable pour suivre l’évolution du stock de capital public, d’instaurer des normes minimales d’investissements, et de préserver le financement par endettement des investissements productifs et générateurs de valeur, tout en veillant à maintenir une trajectoire de soutenabilité de la dette.

 

En matière de logements abordables, Embuild Wallonie demande une réforme fiscale immobilière forte afin de diminuer les droits d’enregistrements pour l'acquisition de logements performants, ou pour lesquels des travaux d'amélioration énergétique sont prévus, mais aussi d’optimiser des mécanismes tels que le chèque-habitat, les primes à la rénovation, les prêts 0%, … Embuild Wallonie propose aussi de soutenir l'offre de logements de qualité, et de prendre des mesures visant à contenir la hausse des prix. Il s'agit d'éviter d’ajouter (en plus de l'inflation des coûts et de l’inflation des taux) une nouvelle « inflation » liée à la législation. Il faut donc une progressivité suffisante et raisonnable dans toutes les mesures/impositions à venir ayant un impact sur le coût des travaux. Embuild Wallonie propose également de développer des PPP attractifs pour la construction de logements abordables, de s’appuyer sur le secteur privé, de ne pas décourager l’investissement privé par des mesures fiscales contre-productives, de renforcer l’offre de logements publics de qualité et d’adapter les budgets de construction des SLSP ou encore développer une offre de financement innovante avec la mise en place de projets pilotes .

 

« Afin de résorber les pénuries de main-d’œuvre qualifiée, nous proposons de mobiliser les demandeurs d’emploi, les demandeurs d’asile, les femmes, …, d’effectuer une orientation positive vers le secteur et d’assurer une insertion durable (travailler sur la rétention/turnover des jeunes et l'évolution vers des fonctions de tuteur ou de formateurs des travailleurs âgés, etc.) », explique Hugues Kempeneers, Directeur-Général d’Embuild Wallonie. « Nous voulons également effectuer une promotion du secteur (campagnes « Nous construisons demain », « Je construis mon avenir », …), assurer un matching entre les besoins du terrain et les formations enseignées, assurer de nouvelles formations pour les nouveaux métiers, et enfin effectuer une mise à jour des référentiels des métiers existants aux nouveaux besoins. »

 

En matière d’accélération de la rénovation énergétique du bâti, la fédération de la construction wallonne propose de revoir les procédures PEB et urbanistiques pour les travaux de rénovation en regard des enjeux d’amplification de la rénovation, les procédures actuelles ayant tendance à décourager les propriétaires à effectuer des travaux de rénovations importantes, et d’instaurer une obligation de rénovation en cas de transfert de propriété d’un bâtiment existant. Les bâtiments présentant les performances les plus faibles doivent être rénovés en priorité (commencer par les labels G puis les labels F).

 

Hugues Kempeneers : « Afin d’accélérer et de simplifier l’octroi des permis d’urbanisme,  nous voulons alléger les procédures administratives relatives à l’octroi des permis d’urbanisme, accélérer le processus de digitalisation de l’instruction des permis et limiter l’inflation de règles urbanistiques qui complexifient de plus en plus la constitution des dossiers de demandes de permis. Dans le cadre de la massification de la rénovation énergétique des logements privés, il convient d’opérer une réelle simplification des formulaires de demandes de permis. »

 

Propositions bruxelloises

Le taux de rénovation actuel moyen est estimé à 1% par an et l’objectif de la stratégie de rénovation, destinée à lutter contre les changements climatiques, est d’atteindre un taux de rénovation de 3%. En se référant au plus de 500.000 logements encore à rénover, il faudrait lancer en moyenne 50 rénovations par jour à Bruxelles. Embuild.Brussels demande de poursuivre et d’amplifier les politiques et les partenariats publics privés mis en place sur le long terme, tels que Renolution et Buildcircular.Brussels.

 

Les coûts administratifs de gestion des chantiers sont de l’ordre de 10 fois plus importants que dans les deux Régions voisines. Les investisseurs potentiels perçoivent ainsi le processus de construction comme complexe, coûteux et incertain. Cela conduit à une diminution de l’activité économique dans la ville, à une perte d’emplois et à une diminution de l’accessibilité financière des logements pour les Bruxellois.

 

Suite aux résultats positifs de référence de Construcity.Brussels, il faut impérativement renforcer les dynamiques sectorielles et de partenariats public-privé dans les domaines de l'emploi et de la formation, notamment en augmentant le rôle des fédérations professionnelles sectorielles. « Nous demandons également de continuer à investir dans la formation en alternance et le duaal leren, en réformant le système vers un modèle d’excellence comme l’apprentissage trial suisse », explique Jean-Christophe Vanderhaegen, Directeur-Général d’Embuild.Brussels.

 

L’augmentation des coûts des logements (30% de 2014 à 2021) et la baisse importante de la mise en vente des appartements neufs contribuent à amplifier l’exode urbain et risque de créer une crise du logement sans précédent. Embuild.Brussels formule différentes propositions pour y faire face, principalement en diminuant la rage taxatoire sur les projets immobiliers.

 

Jean-Christophe Vanderhaegen : « La connectivité des bâtiments et des infrastructures urbaines, la gestion des données, la cybersécurité, et le développement de systèmes urbains intelligents, sont des thématiques fondamentales pour l’avenir des villes dans la transition vers des modes de vie plus durables et intelligents. »

 

Tous les mémoranda peuvent être consultés à l'adresse suivante www.mieuxconstruireensemble.be.